Pasteurella multocida, le choléra des poules
Protobacteria (phylum), pasteurellales (ordre)
Biologie du germe
Cousine du genre Haemophilus, on l’appelle aussi Pasteurella septica. Il s’agit d’un germe aéro-anaérobie facultatif qui se présente sous la forme d’un petit coccobacille à Gram négatif, immobile au microscope.
Ecologie et réservoir de transmission
Les espèces du genre Pasteurella, particulièrement l’espèce multocida, sont parmi les plus fréquentes que l’on rencontre dans le tractus respiratoire des animaux sauvages et domestiques. Par ce fait, les germes de la famille Pasteurella sont donc responsables de zoonose.
La transmission se fait par la morsure – éventuellement la griffure ou le léchage de plaie dans le cas de patient-e-s immunocompromis-e, âgés ou les jeunes enfants – de chat, plus rarement de chien ou de rat. Le germe P. multocida est isolé dans 50% des morsures de chien et 75% des morsures de chat.

Maladie et présentation clinique
L’incubation clinique est courte : en moyenne 3 à 6h, mais toujours moins de 24h !
La symptomatologie de la pasteurellose est la suivante:
- Phlegmon (infection non collectée des tissus sous-cutanés), notamment celui de la gaine des fléchisseurs des doigts
- Douleurs intenses
- +/- lymphangite
- État fébrile

Les complications incluent:
- Suppuration hémorragique
- Arthrite
- Ostéite
- Ophtalmite
- Sepsis
- Méningite
- Complications à distance: arthrite réactionnelle, syndrome douloureux régional chronique
- Patient-e-s immunocompromis-e-s: endocardites, colonisations de bronchiectasies
D’autres Pasteurella sont responsables d’autres atteintes:
- P. ureae – infections respiratoires dans le contexte de tumeurs de l’arbre bronchique
- P. dagmatis, P. stomatis et P. canis – également responsables d’infections des tissus mous post-morsures
Pasteurella multocida et la société
L’incidence des pasteurelloses, porteuse et infectée, est en augmentation depuis les années 2000 (Wilson and Ho, 2013). Les professionnel-e-s au contact d’animaux peuvent être plus facilement porteurs/euses que la population générale.
La mortalité reste faible parmi les humains, sauf pour les manifestations de méningite, endocardites ou sepsis, pour lesquelles la mortalité oscille entre 25 et 30%.
La maladie peut faire des ravages dans les troupeaux de bétail et les élevages. Elle est entre autres responsable de ce que l’on appelle le choléra des poules.
Diagnostic
Culture

La culture reste le standard de base et se fait à partir de frottis de la plaie au site d’inoculation réalisé dans les 24 à 48h post-exposition. Une hémoculture pourra être faite en cas de suspicion de dissémination systémique à partir du site principal.
Une gélose au sang standard sera suffisante à la culture de cet organisme peu exigeant. Elle pousse également sur une gélose chocolat mais ne croît pas sur gélose McConkey.
C’est une bactérie oxidase-positive et qui fermente le glucose.
MALDI-TOF
Actuellement, le diagnostic se fait par MALDI-TOF, pour lequel les bases de données d’espèces ne cessent d’augmenter.
Prévention
La principale prévention concerne les complications. Il incombe en conséquence au prestataire de santé de penser aux Pasteurella devant toute plaintes dans le contexte d’une morsure ou d’une griffure.
Traitement
Le germe est sensible aux bêta-lactamines, aux tétracylcines et aux fluroquinolones. De fait, le traitement de choix est la co-amoxicilline.
Des résistances aux bêta-lactamines ont été décrites dans certaines souches, bien que cela ne soit pas commun. Aucun lien n’a été démontré entre une plus forte morbi-mortalité et la résistance aux bêta-lactamines.
Anecdote
- Le genre Pasteurella a été décrite pour la première fois en 1879 par Henry Toussaint et Louis Pasteur. En 1887, le nom de Pasteurella lui est donné en l’honneur de ce dernier.
Références
- Fox et. al (2015), Laboratory Animal Medicine (Third Edition)
- Boillat, N., Frochaux, V.: Morsures d’animaux et risque infectieux, Rev Med Suisse; volume 6. no. 174, 2149 – 2155, 2008
- Giordano et. al, Clinical Features and Outcomes of Pasteurella multocida Infection. Medicine (Baltimore). 2015 Sep; 94(36):e1285. doi: 10.1097/MD.0000000000001285. PMID: 26356688; PMCID: PMC4616664.
- Wilson BA, Ho M. Pasteurella multocida: from zoonosis to cellular microbiology. Clin Microbiol Rev. 2013;26(3):631-655. doi:10.1128/CMR.00024-13
- Guidelines UpToDate, consulté le 09.09.2021. Disponible ici.