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Treponema pallidum

Spirochaetes (phylum), Spirochaetales (ordre)

Introduction

Le genre Treponema, tout comme le genre Borrelia, fait partie de la famille des Spirochaetaceae.
Nous allons nous intéresser plus particulièrement à l’espèce T. pallidum.

T. pallidum est un petit microbe de 0.1-0.2 μm de large et 15-20 μm de long, avec une forme spiralée (d’où son nom spirochète).
Il ne prend pas la coloration de gram et ne se cultive pas, mais d’autres techniques permettent de le visualiser. C’est un pathogène obligatoire dont l’homme est le seul réservoir et chez qui il cause la syphilis.

Transmission

Le mode de transmission de cette maladie est sexuelle (IST) ainsi que verticale (mère-enfant). Plus rarement, on peut contracter la maladie par contact d’une plaie infectée. Ce sont particulièrement les muqueuses (buccales, génitales et digestives) qui sont touchées et qui servent de réservoir.

Histoire naturelle

Syphilis adulte

L’évolution de la syphilis chez l’adulte (la grande imitatrice, ou encore appelé grande vérole) se fait en 3 stades :

Premier stadestade local
Le premier stade survient dans les 3 premiers mois suivant l’infection. Il se caractérise par l’apparition d’ulcère indolore et isolé (chancre) au site d’inoculation. Il s’agit plus généralement de la région ano-génitale ou de la cavité buccale.  L’ulcère guérit spontanément après 2 à 6 semaines, mais la dissémination hématogène mène au second stade .

Second stade – stade disséminé
Le second stade se manifeste dans les 6 semaines à 6 mois après l’infection. Il se présente par un syndrome grippal (fièvre, pharyngite, céphalée et adénopathies) ainsi qu’un rash muco-cutané touchant typiquement la paume des mains et la plante des pieds. Après plusieurs années, 30 à 50% des malades progresseront vers le stade tertiaire. Une autre partie des malades, eux, progresserons vers un stade de latence.

Troisième stade
Lors du troisième stade, tous les tissus peuvent être touchés.
Néanmoins, les atteintes du système cardio-vasculaire et du système nerveux central (SNC) sont les plus problématiques. Lors d’une atteinte cardio-vasculaire, la multiplication des microbes dans la paroi de l’aorte thoracique conduit à une aortite. Celle-ci peut se compliquer d’un anévrisme ou d’une sténose des artères coronaires, toutes deux potentiellement mortelles. Lors d’une atteinte du système nerveux central (neurosyphilis), plusieurs stades se succèdent. La méningite syphilitique est la première forme d’atteinte du SNC, pouvant être  symptomatique (céphalée, photophobie et raideur de nuque … ) ou non. Dans un stade ultérieur la méningite peut se compliquer d’un vasculite (méningovasculite) des petites et moyennes artères du SNC. La complication majeure de ce stade est l’accident vasculaire cérébral. Les complications tardives se divisent en deux entités : La méningo-encéphalite et les tabes dorsalis. La première est une forme de démence fronto-temporale, la seconde une atteinte des cordons dorsaux de la moelle épinière.

De plus, dans certains cas on peut retrouver un rash assez caractéristique de type roséole sur le torse du patient.

Syphilis congénitale

En plus des formes retrouvées chez l’adulte, la syphilis peut aussi infecter le fœtus (syphilis congénitale). Celle-ci survient lorsqu’une femme enceinte se trouve au stade primaire de la syphilis. Le tréponème peut alors passer dans la circulation sanguine et passer la barrière placentaire pour finalement infecter le fœtus.  Si la syphilis congénitale n’est pas traitée, elle peut provoquer des atteintes graves chez le fœtus, qui varient en fonction du stade de développement de celui-ci. De manière générale, soit le fœtus meurt (in utéro ou néonatal précoce), soit la syphilis se développe chez le nourrisson (causant par exemple un retard neurologique).

Incidence

La syphilis fait partie des IST les plus fréquentes, au même titre que les infections à N. gonorrhoeae, C. trachomatis, HBV et HIV (les «big five»).
Bien que l’incidence soit mondiale et sans saisonnalité, 90% des cas de syphilis se trouvent dans les pays en voie de développement.
Dans l’Union européenne, l’incidence est en moyenne de 7 cas par 100’000 habitants. Les hommes sont plus touchés (90% des cas), en particulier ceux ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH : 70% des cas). Il est important de remarquer que l’incidence est en augmentation depuis les années 2000 dans les pays d’Europe de l’Ouest, passant par exemple en suisse de moins de 250 cas en 2006 à plus de 1’000 cas en 2019.

Diagnostic

Les méthodes diagnostiques reposent sur l’observation directe du pathogène et sur la sérologie (sérum et LCR), mais pas la culture.

  • Au stade primaire, étant donné que le chancre représente le site de multiplication du microbe, un frottis peut-y être effectué.
    Avec cet échantillon, le laboratoire a le choix entre deux techniques diagnostiques : la microscopie à fond noir ou l’immunofluorescence (plus coûteuse mais plus sensible et plus spécifique).
  • Une autre méthode diagnostique est la sérologie, où l’utilise des tests non-tréponémiques (VDRL, RPR) et des test tréponémiques (TPHA, FTA-abs …). Les premiers sont très sensibles en début d’infection (stades primaire et secondaire), mais tendent à se négativer avec le temps. Ils sont corrélés avec l’activité de la maladie et permettent de ce fait de distinguer une syphilis active d’une syphilis latente. Il faut toutefois noter que malgré leurs grandes sensibilités, ces tests ne détectent qu’indirectement la présence du pathogène et sont peu spécifiques. De part leur sensibilité et leur faible coûts, ces test  sont utilisés à des fins de dépistage, mais le diagnostic de certitude nécessite un second test plus spécifique. Les test tréponémiques détectent les Ag de T.  pallidum ainsi que les IgM et IgG produites par l’organisme. Ces tests sont peu sensibles au début de l’infection mais restent positifs durant une très longue période. Ils sont bien plus spécifique que les test non-tréponémiques.
  • Enfin, des PCR sur des frottis de chancre lors de la première phase et sur  des frottis de papules lors de la phase secondaire sont souvent utilisés. En effet, les PCR sanguines ont une très mauvaise sensibilité.

Traitement

La pénicilline G administrée par voie parentérale est le traitement de choix, quelle que soit le stade. Les tests sérologiques non-tréponémiques corrélant avec l’activité de la maladie, ilo est conseillé d’effectuer un suivi à 3, 6 et 12 mois post-traitement afin d’en suivre l’efficacité.

Prévention

La syphilis est une maladie évitable, qui se prévient par l’utilisation de préservatifs (voie sexuelle) ainsi que par le dépistage et le traitement des femmes enceintes infectées (voie verticale). Pour les professionnels de la santé, il faut veiller à éviter tout contact avec les chancres et les liquides biologiques des malades.

Diagnostic de la syphilis. Remerciement à la Dre. Coste
Microscopie électronique montrant T. pallidum

Anecdotes

  • L’étude de Tuskegee sur la syphilis (1932-1972) est une étude clinique menée à Tuskegee pour y étudier l’histoire naturelle de la syphilis non traitée, alors même que la pénicilline avait déjà fait ses preuves et était disponible ! Scandale éthique, cette étude conduite sur plusieurs centaines d’afro-américains pauvres a été à la base de la rédaction du « rapport Belmont », un des documents les plus importants de la bioéthique.